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"Zéro Excursion", fiction ou réalité ?

"Zéro Excursion", fiction ou réalité ?

La chaîne du froid des produits de santé (vaccins, médicaments, échantillons, prélèvements …) est soumise à une réglementation stricte. Les acteurs concernés recherchent les solutions permettant de répondre aux exigences réglementaires et aux spécifications du produit. Il s’agit pour eux de sélectionner une solution permettant de sécuriser la température du produit mais à moindre coûts et sans contraintes de préparation. Basé sur l’analyse de milliers de relevés de température réels, cette étude vous présente les principales causes des excursions de températures et les actions à mettre en œuvre pour les éviter.

« Zéro excursion » est-il un objectif réaliste et atteignable ou un vœu pieux ? Quelles sont les principales causes d’excursions ? Comment les éviter ?
 

Plage de température

Les plages de température les plus concernées par les problèmes d'excursions sont le +2/+8 °C et le +15/+25 °C. Pour ces deux applications, la solution doit répondre aux exigences des limites basse et haute. 

Les produits congelés sont moins concernés car la température extérieure est toujours supérieure à la limite haute. Il suffit d’utiliser un PCM ayant une température de fusion inférieure à la limite haute et proche de la limite basse de la plage.

 

Figure 1- Quand et comment utiliser une plaque eutectique à base d’eau versus un PCM ?

Figure 1- Quand et comment utiliser une plaque eutectique à base d’eau versus un PCM ?

 

Plaques eutectiques à base d’eau ou PCM ?

Le matériau utilisé pour le stockage thermique (froid ou chaleur) est le premier paramètre déterminant dans les excursions et plus particulièrement sa température de fusion. 

Les solutions eutectiques à base d’eau offrent une chaleur latente importante à une température inférieure ou égale à 0 °C pour un coût réduit. Cette solution est utilisée pour les produits devant être conservés entre +2 °C et +8 °C, en double voire triple configuration été, hiver et intersaison. La difficulté demeure dans la gestion des intersaisons et le passage d’une configuration à l’autre. Elle est également utilisée en configuration unique pour des circuits logistiques caractérisés par un profil chaud avec d’éventuels segments froids très courts. Dans certains cas, des plaques stabilisées à +5 °C sont utilisées comme séparation entre les plaques congelées et les produits pour réduire le risque d’excursions en dessous de +2 °C.

Les PCM sont utilisés pour les produits +2/+8 °C, +15/+25 °C et pour d’autres températures positives spécifiques. Les PCM offrent une chaleur latente inférieure à celle de l’eau à une température adaptée aux produits pour un coût plus élevé. Cette solution peut être utilisée en double configuration été et hiver ou en mono-configuration.

En configuration universelle, les plaques de PCM sont généralement congelées puis remontées en température et placées autour des produits (sur les 6 faces). Dans certains cas, elles sont stabilisées à une température proche de +5 °C sans atteindre la congélation. Dans les deux cas, la solution est surdimensionnée car l’énergie thermique stockée est réduite.

En choisissant une température de fusion adaptée, les solutions eutectiques à base d’eau permettent de conserver les produits congelés en mono-configuration. La glace carbonique permet également de conserver les produits congelés à très basse température.


Figure 2 – Comparaison des caractéristiques de préparation des plaques eutectiques à base d’eau versus les PCM pour +2/+8 °C Figure 2 – Comparaison des caractéristiques de préparation des plaques eutectiques à base d’eau versus les PCM pour +15/+25 °C.

Figure 2 – Comparaison des caractéristiques de préparation des plaques eutectiques à base d’eau versus les PCM pour +2/+8 °C et +15/+25 °C.

 

Peut-on éviter la congélation des PCM ou des solutions à base d’eau ?

La capacité de stockage thermique est principalement assurée par la phase latente. Quel que soit le matériau, la phase sensible ne peut offrir des performances suffisantes pour répondre aux besoins réels. Les solutions eutectiques à base d’eau ayant une température de fusion de 0°C ne peuvent être correctement congelées qu’à des températures inférieures à -10 °C. Les PCM utilisés pour les produits +2/+8 °C ont une température de fusion entre +3 et +7 °C. Pour solidifier ces PCM, il faut utiliser une chambre spécifique réglée à une température proche de 0 °C ou utiliser les congélateurs standards fonctionnant entre -30 °C et -18 °C, et passer ensuite par une phase de remontée en température. Les PCM peuvent être stabilisés à une température entre +2 et +5 °C, mais leurs performances seront très réduites.  

 

Analyse des excursions de température

Figure 3 : Paramètres à l’origine des excursions, Répartition des excursions enregistrées en %

Figure 3 : Paramètres à l’origine des excursions, Répartition des excursions enregistrées en % 

 

Les excursions de températures et leur position dans le circuit logistique sont déterminées, ce qui a permis d’identifier l’étape logistique et l’environnement associé.

Dans une démarche d’amélioration continue, l’analyse a permis d’évaluer la compatibilité de la configuration qualifiée avec les profils réels et de proposer des solutions adéquates.

Les excursions sont classées en fonction de leur nature (en dessous de +2 °C ou au dessus de +8 °C) et selon l’étape logistique : au départ, pendant le transport et à l’arrivée. 

Les paramètres suivants peuvent être à l’origine des excursions de températures :

  • Préparation des éléments de la configuration,
  • Préparation et paramétrage de l’enregistreur,
  • Chargement de l'emballage isotherme,
  • Moyens de transport (véhicule réfrigéré ou non, avion...),
  • Stockage intermédiaire (douanes, transfert…),
  • Réception et déballage à l’arrivée.

 

60% des excursions sont enregistrées au départ et 30% à l’arrivée. Soit 90% des excursions sont majoritairement dues à des erreurs de préparation ou de déballage, et potentiellement évitables.

Les excursions en dessous +2 °C sont enregistrées pour la configuration utilisant des plaques eutectiques congelées. Elles se produisent au départ, lorsque les caisses sont remises en chambre froide après chargement, et dans certains cas au milieu du profil suite à un stockage intermédiaire à +5 °C ou un transport par camion frigorifique non prévus.

Les excursions supérieures à +8 °C sont principalement enregistrées pour la configuration utilisant des plaques eutectiques ou de PCM stabilisés à +5 °C. Cette configuration nécessite une préparation appropriée car la réserve de froid est très réduite et tout dépassement de +8 °C au départ entraîne des excursions du même type au milieu et à la fin du profil. 

 

L’analyse statistique des relevés réels montre que les profils de température réels sont plus modérés que ceux exigés dans les tests de qualification.

Dans la majorité des cas les profils chauds ou froids exigés pour la qualification sont plus contraignants, ce qui peut compliquer la solution et causer des excursions.

La majorité des expéditions internationales utilisent au moins un stockage ou un transport à +5 °C et la durée n’est pas maîtrisée. Si la caisse est qualifiée pour être stockée et transportée dans un milieu ambiant (entre +15 et +25 °C), le stockage intermédiaire à +5 °C ou l’utilisation d’un camion frigorifique implique des excursions en dessous de +2 °C. Dans certaines configurations c’est l’inverse qui se produit lorsque les étapes logistiques prévues à +5 °C ne sont pas respectés. Pour une même destination, les segments les plus chauds et les plus froids ne sont pas figés dans le temps et changent de position dans les profils. Ils peuvent être identiques à la position retenue dans les profils de qualification ou en avance ou en retard.

La majorité des alarmes au départ et à l’arrivée sont de fausses excursions enregistrées au chargement en introduisant les enregistreurs chauds ou à l’arrivée en les retirant sans arrêter l’enregistrement.

Dans plusieurs cas, l’enregistrement n’est arrêté que plusieurs jours ou même plusieurs semaines après l’arrivée de la caisse à destination.

 

Pour une meilleure maîtrise

La chaîne logistique à température contrôlée doit être maîtrisée dans sa globalité, depuis l’établissement du cahier des charges jusqu’à l’utilisation de la solution, en passant par la conception et la qualification.

Les responsabilités et les critères d’acceptation doivent être définis.

Cette approche globale permet d’optimiser les performances et le coût logistique total (TCO). 

 

Conception et qualification

Le cahier des charges permettant de concevoir ou de choisir un emballage à température contrôlée, il doit tenir compte des exigences de température du produit et des tolérances acceptées basées sur les tests de stabilité. Les étapes logistiques et les durées associées doivent être identifiées (préparation, stockage, chargement, transport, stockage intermédiaire, douanes,  zone de transfert et de livraison…). Une analyse de risques tenant compte de tous les paramètres de l’expédition doit être établie.

 

Départ de l’expédition

Le moyen utilisé pour le stockage thermique (PCM ou solution à base d’eau) doit être préparé dans les conditions requises et selon le mode opératoire validé. Le temps de chargement doit être réduit. Les plaques congelées (PCM ou à base d’eau) doivent être chargées en premier, ensuite celles à l’état liquide et enfin les produits. Pour les produits +2/+8 °C, le stockage et le transport de caisses isothermes à +5 °C sont favorisés pour les configurations utilisant des plaques non congelées. L’inverse doit être appliqué pour les configurations avec des plaques congelées. Les enregistreurs de température doivent être conditionnés à la température des produits et paramétrés d’une manière adaptée.

 

Pendant le transport

Le circuit logistique réel doit être identifié et la configuration doit être adaptée. Les étapes de stockage ou de transport prévues à +5 °C (chambre froide ou camion frigorifique) doivent être respectées. Les partenaires logistiques et tous les acteurs doivent être formés et informés. 

 

Arrivée à destination

Une procédure pour le déballage et l’arrêt des enregistreurs doit être établie et respectée pour éviter les fausses excursions et les fausses alarmes. Les intervenants à l’arrivée doivent être formés et informés. 

 

Une caisse isotherme équipée d’un moyen de stockage thermique est une solution conçue pour des profils de température prédéfinis. L’utilisation des PCM et le surdimensionnement de la solution permettent de réduire les excursions de température mais ne peuvent les éradiquer.

Pour atteindre zéro excursion, le circuit logistique doit être maîtrisé dans des limites prédéfinies de température et de durée. Ces conditions doivent être respectées pour garantir la reproductibilité des résultats.

Le phénomène des excursions de température dépasse la seule responsabilité de la caisse isotherme au respect du mode opératoire établi et à la maîtrise des étapes logistiques. Les aléas logistiques représentent la première cause des excursions.

La chaîne du froid doit être optimisée dans sa globalité : cahier des charges, conception de la caisse, pré-qualification, préparation, transport, réception. Tous les acteurs de la chaîne doivent être formés et informés pour respecter les bonnes pratiques d’utilisation de la solution. Ils doivent être également impliqués dans un processus d’amélioration continue.